Les 30e universités de la CSMF se sont déroulées cette année au Palais des Congrès de Saint Malo !
Elles ont eu lieu du 19 au 21 septembre 2024 pour échanger et débattre sur le thème :
« Le CHOC d’attractivité c’est MAINTENANT »
Discours d’ouverture par Franck Devulder, président de la CSMF
Monsieur le Directeur Général de la CNAM,
Madame la Conseillère nationale de la région Bretagne et trésorière adjointe du Conseil national de l’ordre des médecins,
Mesdames et Messieurs les Présidents de syndicats,
Mesdames et Messieurs en vos grades et qualités,
Chères Consoeurs, Chers Confrères, Chers Amis,
C’est avec un immense plaisir et un grand honneur que j’ouvre, aux côtés de vous, Monsieur le Directeur Général, nos 30èmes universités d’été. Plaisir car cette année 2024, qui pourtant n’est pas arrivée à son terme, restera dans nos mémoires par son caractère historique.
2024 restera l’année des JO de Paris 2024. Et quels jeux ! Les Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris ont fait rayonner la France aux yeux du Monde. Comment ne pas être fier du travail accompli par le comité d’organisation ? Comment ne pas être fier de cette France qui sait organiser, accueillir, célébrer et aussi gagner.
Mais cette année 2024 restera aussi pour nous, médecins, celle de la signature de la convention médicale que nous attendions depuis 8 ans…
Monsieur le Directeur Général, ce n’est un secret pour personne que le rôle de la CSMF y a été déterminant. Et nous en sommes fiers. Fiers parce que sans cela, nous aurions laissé nos confrères dans un règlement arbitral minimal. Un règlement sans possibilité d’avenant. Un règlement qui figerait les tarifs des consultations et repousserait aux calendes grecques la réforme tant attendue de la CCAM. Oui nous sommes fiers de cette signature. Nous sommes fiers d’avoir fait évoluer le texte conventionnel. Cette convention médicale est à nos yeux très particulière. Très particulière car elle s’inscrit dans un climat de tension inédit de notre système de santé depuis la création de la sécurité sociale en 1945. Jamais nos concitoyens n’ont été confrontés à de telles difficultés d’accès aux soins. Nous en connaissons toutes les causes. Les transitions épidémiologiques tout d’abord. Depuis la fin des années 70, nous savions que le poids des maladies chroniques allait profondément modifier les prises en charge. Nous sommes passés d’une médecine centrée sur les pathologies aiguës à une médecine dédiée aux maladies chroniques, et cela a bouleversé notre manière de soigner. Les transitions démographiques. Nous savions qu’en réduisant drastiquement le numérus clausus dans les années 80 et 90 nous n’assurions pas le renouvellement de nos médecins. Nous savions que nous allions être face au départ massif des baby-boomers. Les transitions professionnelles qui, en médecine comme ailleurs, ont profondément modifié le rapport au travail. Comment ne pas en tenir compte pour construire le système de santé de demain ? Mais aussi les transitions numériques. Comment ne pas imaginer que l’IA sous garantie humaine ne va pas profondément bouleverser nos pratiques et nos organisations?
Si nous sommes fiers d’avoir si fortement contribué à la signature de cette convention, celle-ci ne peut être à nos yeux qu’un point de départ pour la médecine libérale du 21ème siècle. La médecine libérale nécessite un véritable choc d’attractivité pour redevenir un pilier fort et attractif de notre système de santé. Cette demande est la nôtre mais aussi et surtout celle des français. Or le compte n’y est pas. Les revenus des médecins libéraux continuent à baisser. Et pourtant, n’en déplaise aux propos inexacts récemment tenus par la FHF à notre endroit, c’est bien la médecine libérale qui, par son agilité et sa dynamique, remettra sur les rails un système de santé en souffrance. Les médecins libéraux le montrent au quotidien en particulier par l’augmentation du nombre des médecins généralistes participants à la PDSA assurant une couverture de 97% des nuits et des week-ends. Il en va de même dans les cliniques et les ESPIC dont l’activité a dépassé celle constatée avant le Covid, quand l’hôpital n’a pas encore rattrapé ce retard malgré une augmentation de plus de 10% du nombre de praticiens hospitaliers à temps pleins en 10 ans mais aussi, dans une moindre proportion, des agents hospitaliers ces 4 dernières années. Loin de moi de vouloir déclencher une guerre entre le public et le privé, tous deux financés par les cotisations sociales des français. Mais, en revanche, les responsables politiques ne peuvent plus jeter un voile pudique sur la vérité des chiffres rappelés par la Cour des Comptes.
Cette convention apporte des notions nouvelles pour la pratique médicale. Elle ouvre le champ de la prévention. Elle introduit pour la première fois le principe d’une meilleure rémunération de la qualité et de la pertinence. C’est une réelle avancée. La CSMF le demandait depuis longtemps. Les médecins de notre pays font un travail remarquable. Nous sommes fiers d’avoir introduit cette notion d’une meilleure prise en compte de la qualité et de la pertinence. Il faut cependant aller plus loin dans une hiérarchisation de nos actes. Une hiérarchisation simple et dynamique. Le médecin est l’expert de notre santé. Nous devons nous engager à voir plus de patients différents et donc diminuer la fréquence des consultations chez un même patient quand son état de santé le permet. Ces consultations d’expertise, APC chez les spécialistes ou consultation longue en médecine générale, doivent augmenter au service d’un meilleur accès aux soins. Cela ouvrira la porte du partage de compétences et du rôle des autres professionnels de santé. Il n’est pas question de revenir sur les fondements de l’exercice médical. Le médecin a deux missions spécifiques que sont de poser un diagnostic et de proposer un plan de soins. Mais ce dernier doit faire appel aux compétences des autres professionnels de santé qui ne cessent d’évoluer. En un mot, pour nous le transfert de compétence c’est non. Le partage de compétences dans le cadre d’un parcours de soin où le médecin joue le rôle de chef d’orchestre est une évidence. Permettez moi, devant vous, de saluer la position forte et parfaitement claire du Président du CNOM, le Dr François Arnault.
Mais cette convention introduit également la notion d’engagements collectifs. Vous savez tous que ces engagements ne sont pas opposables individuellement et ne peuvent en rien remettre en cause le texte conventionnel. Nous devons réussir et atteindre ces engagements. Et vous savez très bien, Madame la Ministre, que ce « nous » est collectif. C’est le nous des médecins libéraux. C’est le nous de la CNAM. Mais c’est aussi le nous du Gouvernement, de votre Ministère et des élus de la nation. Comment, par exemple, pourront-ils seuls répondre à l’engagement qui vise à augmenter les installations en libéral ? Nous en rêvons tous ! Mais pour cela, il faut un choc d’attractivité. Pour cela il faut aussi ralentir les créations de postes à l’hôpital. Il y a quelques mois le Président Sarkozy s’exprimait lors d’un débat en disant « redéfinissons les missions de l’hôpital. Donnons-lui les moyens de les assumer. Et laissons à la médecine libérale le rôle qui doit être le sien ». Je ne peux que m’associer à ces propos. Ces engagements collectifs vont tous nous obliger à répondre à la forte revendication de la CSMF d’avoir des négociations tarifaires annuelles, des NAO de la médecine libérale.
Ce choc d’attractivité que nous appelons avec force s’inscrit dans un contexte économique là aussi inédit. 3300 Mds de dettes. Et la dette sociale en représente plus de la moitié. La CSMF est un syndicat responsable. Vous connaissez nos valeurs libérales et sociales qui nous unissent tous. Nous mesurons parfaitement que nous devons avoir la culture de l’économie. En toute franchise, je crois que nous nous y employons déjà dans notre exercice quotidien. Mais ces économies sont l’affaire de tous. Prenons un sujet brûlant. Celui de l’augmentation du coût des indemnités journalières, ce qui vous en conviendrez n’est pas strictement la même chose que celui du nombre des arrêts de travail. Évidemment, nous médecins, devons être attentifs dans nos prescriptions. Comment pourrait-il en être autrement ? Mais nous savons bien que cela est multifactoriel. La réduction du chômage et l’augmentation de salaires jouent beaucoup dans la « facture IJ ». La CSMF vous fait deux propositions. Celle de travailler avec la patronat pour avancer ensemble sur ce sujet pour les AT de courte durée dont on sait tous que le bien être au travail est un facteur déterminant. Celle des AT longs où au-delà de la durée recommandée de l’arrêt de travail par la HAS, nous appelons au rôle que devraient jouer les médecins conseils de l’assurance maladie. Nous ne réformerons pas notre modèle social seuls. Nous ne réformerons pas notre système de santé avec les seuls médecins libéraux. Le Danemark a su mener une réforme en 6 points centrée sur les territoires. Et cela marche. Ne pensez-vous pas qu’au-delà des corporatismes des uns et des craintes des autres nous devrions avoir le courage et une ambition gaullienne d’écrire une nouvelle page de notre histoire ? La CSMF y est prête et sera votre partenaire. Nous aborderons ce week-end avec la CN URPS le sujet de la responsabilité populationnelle promu par la FHF depuis 2017. Ce sujet inquiète. Il ne peut en rien être à la seule main de l’hôpital ni même des seuls ARS. C’est un sujet sociétal qui concerne les Français, leurs élus, leurs soignants. Osons aborder ensemble ces thématiques où la médecine libérale, porte d’entrée dans le système de santé, doit avoir une place et une reconnaissance particulière.
Permettez moi enfin d’aborder devant vous la nécessaire réforme de notre système conventionnel. Les longs mois que nous avons passés à négocier, ces mouvements sociaux de médecins libéraux contre tel ou tel PPL et finalement une convention signée par tous les syndicats responsables nous amènent au constat qu’il faut réformer notre système conventionnel. Réformer et pas détruire. La granulométrie d’une proposition de loi ou celle d’un texte réglementaire ne remplacera jamais la qualité d’un dialogue conventionnel entre les acteurs de la santé, médecins, autres professions de santé et les assureurs que sont la CNAM et l’UNOCAM. La CSMF appelle à une réforme ambitieuse de notre système conventionnel, pour le rendre plus agile, plus dynamique, et mieux adapté aux réalités de la médecine moderne. Je suis convaincu que les engagements collectifs vont nous y aider. Mais je suis convaincu également que nous devons instaurer le principe de négociations annuelles obligatoires, des NAO de la médecine libérale.
Enfin et pour conclure, 2024 est pour nous celle du 30ème anniversaire des Universités d’été initiées sous la Présidence de mon ami Claude Maffioli pour qui j’ai une pensée émue et dont je salue la mémoire. Et un anniversaire, cela se fête ! Nous sommes plus de 280 participants cette année à Saint Malo. Je vous souhaite à toutes et à tous de très bonnes universités. Profitez de ces moments de partages, d’échanges, de débats. Profitez de cette convivialité qui nous caractérise. Nous avons souhaité que ces Universités soient festives, et leur succès revient à notre directrice générale, Sylvie Aubry, que je tiens à remercier chaleureusement en votre nom. Nous le devons à toute une équipe que je vous demande d’applaudir. Bravo et merci à Sylvain, Isabelle, Vanessa, Fabienne, Laurence, Ingried, Celia et Marie-Aline. Merci et bravo à notre fabuleuse équipe. Je vous souhaite à toutes et à tous d’excellentes Universités, riches en échanges et en découvertes.
Monsieur le Directeur Général, permettez moi à nouveau de vous remercier d’avoir répondu favorablement à notre invitation et d’avoir accepté ce temps d’échange ici avec les cadres de la CSMF réunis nombreux pour nos 30ème Universités.
Docteur Franck DEVULDER
Président de la CSMF