Actualités région Auvergne-Rhône-Alpes

Exercice professionnel : le défi de la reconnaissance
Deux médecins engagés au service de leurs patients réclament une meilleure reconnaissance et une meilleure valorisation des caractéristiques spécifiques de leur activité. Témoignages.
Dr Jean-Christophe Masseron, administrateur et ancien président de SOS Médecins France : « Les visites sont un maillon essentiel de l’accès aux soins »
« Notre système de santé se doit de garantir un accès équitable et durable aux soins, comme le prévoit notre contrat social. SOS Médecins y contribue pleinement, en comblant le fossé entre les urgences hospitalières et les médecins traitants, notamment en période d’épidémie.Essentielles pour les patients vulnérables, les visites à domicile sont en déclin depuis vingt ans, en raison de leur faible rémunération qui découle en partie de la volonté de privilégier les consultations en cabinet pour optimiser la ressource médicale. C’est une erreur stratégique commise par les pouvoirs publics, car elle prive les personnes fragiles d’un service vital, non sans décourager de nombreux praticiens. Intellectuellement stimulantes et socialement utiles, ces visites doivent être revalorisées pour « inciter » les médecins et maintenir l’accès aux soins des patients les plus vulnérables. Leur montant devrait être calqué sur celui des visites longues, car elles nécessitent souvent une coordination complexe et une prise en charge approfondie, notamment pour les situations urgentes. Malgré la généralisation progressive du SAS, qui est appelé à devenir la porte d’entrée dans le système de santé pour les soins non programmés, notre périmètre d’intervention doit être sanctuarisé, de la prise d’appel à l’effection de la mission. SOS Médecins doit rester une plateforme de tri et de régulation, que ce soit pour les urgences ou les épisodes de soins aigus, afin de garder un accès direct aux patients.Autre enjeu critique : la convention médicale réduit le champ des majorations applicables en dehors du cadre officiel de la permanence des soins, qui représente deux tiers de nos actes, mais dont nous ne pouvons plus bénéficier. SOS Médecins doit impérativement conserver son mode de fonctionnement historique avec une régulation reconnue et des actes majorés si nécessaire. »
Dr Jean-Baptiste Delay, président de l’Association des médecins de montagne : « Une rémunération déconnectée des réalités de notre pratique »
« La médecine générale en montagne est un exercice complexe, dont les spécificités sont très largement méconnues des pouvoirs publics. Cette pratique est particulièrement coûteuse en termes de personnel, d’équipement et d’espace, surtout dans des lieux chers comme Val d’Isère, mais nos actes techniques n’ont pas été revalorisés depuis 1999. La nouvelle convention médicale nous pose également des problèmes. Utilisé pour la prise en charge des urgences, l’acte 4Y10 est désormais limité aux hospitalisations, ce qui est totalement contre-productif sur le plan médico-économique. Autre problématique majeure : la rémunération des consultations réalisées les jours fériés et les week-ends, périodes où la traumatologie du ski est la plus fréquente, est totalement déconnectée des réalités de notre métier. La consultation régulée du dimanche est mieux rémunérée, mais seuls les médecins de garde peuvent l’utiliser, non sans pénaliser les autres praticiens. Salaires, équipements radiologiques, fournitures médicales… Nos revenus ne permettent plus de compenser la hausse de nos charges qui ont explosé ces dernières années, avec une accélération notable depuis la pandémie de Covid-19. De plus en plus expérimentées, nos assistantes et nos secrétaires sont aussi de mieux en mieux payées, ce qui augmente encore nos frais de fonctionnement. Dans un périmètre économique contraint, la viabilité de notre activité et le renouvellement générationnel sont ouvertement menacés, mais cette situation n’est pas une fatalité. Pour inverser la vapeur, les médecins de montagne demandent une revalorisation des actes spécifiques et une reconnaissance des contraintes particulières de leur pratique. Ils souhaitent également que les consultations de week-end soient mieux rémunérées pour refléter les coûts réels, notamment en termes de personnel, et favoriser la continuité des soins dans ces zones touristiques. »