Le gouvernement et l’assurance maladie veulent contraindre la prescription des arrêts de travail, en fixant un objectif de réduction des indemnités journalières aux « surprescripteurs ». Le mot d’ordre est clair : refusez cette proposition et faites-vous accompagner par un cadre syndical.
Le ton budgétaire est donné. Bruno Lemaire recherche entre dix et quinze milliards d’euros pour accélérer le désendettement du pays(1). Sous la pression des agences de notation, le gouvernement veut notamment réduire les dépenses liées aux arrêts de travail dits de « complaisance ». Deux raisons sont évoquées par Bercy : leur augmentation constante et leur coût croissant pour les finances publiques(2). Plusieurs pistes sont actuellement étudiées pour maîtriser cette hausse, comme un renforcement des contrôles ou un transfert partiel de charges vers les entreprises, mais la chasse aux « surprescripteurs » a déjà été lancée par l’assurance maladie. Pas moins de 15 000 médecins généralistes ont été contactés cet été… et un millier d’entre eux se sont vu proposer une mise sous objectifs de leurs prescriptions d’indemnités journalières, souvent au mépris des réalités épidémiologiques et sociétales.
Une procédure légale, mais non obligatoire
La règlementation est formelle(3) : le directeur de la caisse peut proposer de fixer un objectif de réduction des prescriptions aux médecins qui ne justifient pas une mise sous accord préalable(4). Conjointement élaborée avec le médecin-conseil chef de service compétent, cette proposition doit être notifiée au praticien concerné, en tenant compte de la situation constatée et des observations éventuelles de ce dernier, qui peut la refuser. Les modalités pratiques de la procédure et le contenu détaillé de la proposition doivent être préalablement communiqués au médecin visé, qui doit notamment être informé du montant maximum de la pénalité encourue en cas de dépassement de l’objectif. Sa réalisation est appréciée au regard de l’écart, par rapport à la moyenne servant de base de référence, du nombre, de la durée ou du taux constaté des prescriptions au cours du délai imparti, soit entre quatre et six mois.
Un refus de circonstance
Dans le contexte actuel, la CSMF vous déconseille fortement de signer un objectif de réduction des indemnités journalières, qui reviendrait à reconnaître la non-conformité de vos prescriptions dont le médecin-conseil ne possède pas les éléments d’appréciation. Par ailleurs, en cas d’échec, vous passeriez immédiatement par la case des pénalités, qui interviennent uniquement en cas de récidive après deux périodes de mise sous accord préalable. Si vous avez reçu un courrier de la caisse, la conduite à tenir est relativement simple : envoyez vos observations dans le délai prévu, soit un mois, et demandez à être entendu et accompagné par un confrère de la CSMF. Si, à la suite de vos observations et de votre entretien, le directeur de la caisse vous fixe un objectif de réduction des prescriptions : REFUSEZ ! Comme le prévoit la règlementation, ce refus doit être signifié par lettre recommandée avec accusé de réception dans un délai de quinze jours à compter de la notification.
(1) La dette publique de la France a franchi le seuil symbolique des 3 000 milliards d’euros au premier trimestre 2023.
(2) Selon le dernier rapport Charges et produits de l’assurance maladie, les arrêts de travail ont coûté 14 milliards d’euros en 2022… hors Covid.
(3) Décret n° 2011-551 du 19 mai 2011.
(4) La procédure de mise sous accord préalable consiste, avant l’exécution de certains actes et traitements médicaux, à demander à l’assurance maladie si elle accepte de les prendre en charge.